#0017 - Jean VERTEX
VERTEX Jean, Bistrots, reportages Parisiens, 1935, Louis Querelle, Illustrations de d'Esparbès, R. Guérin, Gen-Paul, R. Naly, J. Sennep, Vallaud.
Pour le chapitre Nègres de Montmartre: "Pourtant, si j'avais vraiment envie de voir danser des nègres, si c'était la condition de mon bonheur ce soir ? […] Aujourd'hui, par exemple, tu ferais ton bonheur d'un nègre de jazz-band. -Imbécile ! D'abord ça n'est pas si bête un nègre de jazz. -Oui, oui, je sais: le saxophone. Tu adores le saxophone […] L'or des instruments vibrait sous les doigts bruns qui concevaient des accords hystériques […] L'orchestre s'enflamma. Déferlant en cascades de notes tropicales sur le bistrot fébrile, roulant en des remous fougueux, les instruments fondaient leurs sortilèges […] Le saxophone aux sanglots étranglés aux longs appels sauvages où planent du désir, de la folie, du vice, de la joie délirante, du meurtre et du soleil, le piano, gros bourgeois paillard qui ricane avec des hoquets d'homme ivre, et l'ukulélé qui chuchotte son chant de cigale exotique, et l'accordéon gouailleur […] Les femmes se livraient au roulis érotique de la danse créole […] Soudain une voix s'éleva que seul le saxo conduisait […] Crazy people, crazy people / Why are you so sad here below ? […] La petite ne dansait plus: prisonnière de son nègre de jazz, le corps soudé à lui […] Crazy people, crazy people / Why ever say: oh ! What a pain ! […] Quand le chanteur de jazz m'eût rendu sa danseuse […] Ah ! Parles-en du bistrot nègre. Et parles-en de ton chanteur de jazz ! Un vrai rasta, pendant tout le temps qu'a duré la danse ses yeux n'ont pas cessé de convoiter ma bague" (p.141-153).