#0015 - Josef SKVORECKY


SKVORECKY Josef : Le saxophone basse & Autres nouvelles (Bassaxofon), 1967, 78, Gallimard Du Monde Entier 1983, Trad. Claudia Ancelot
Nouvelles extraites de : Bassaxofon, Horkej svet, Prima sezona, Pribeh inzenyra lidskych dusi, Babylónský príbeh. Le saxophone basse, Eve était nue, Une sorcière au mois de mai, Babylone sur Vltava, Rebecca, Déjà du temps des pyramides, La fin de Bull Macha, Du travail pour le service du personnel, Un manuscrit de contrebande. Quelques lignes de chacune des nouvelles pleines de l'amour du jazz que leur insuffle Skvoresky. Les années 45-55 en Tchécoslovaquie.
Le saxophone basse: "En l'an quarante, quand l'invraisemblable devint possible (six cuivres, une grande formation, une basse, des tambours, une guitare, un piano), Syrovatka descendit de sa montagne et nous eûmes donc cinq saxophones, il était assis tout au bout de la rangée blanche avec ses épaules d'armoire à glace dans le veston de toile métis, il ne swinguait pas mais sous les feux son instrument mythique brillait d'une lumière mate et nous jouions tous les quatre au-dessus de lui, dans notre chant il y avait aussi la joie de l'avoir parmi nous, même si, au-dessous de nos accords glissants, il cheminait sur ses propres sentiers de montagne. Mais l'instrument que je venais d'entrevoir était quelque chose de bien plus mystérieux encore: un saxophone basse"
Une sorcière au mois de mai: "Et dans cette vitrine il n'y avait rien de nouveau. Un saxo alto de la marque Toneking qui y séjournait depuis deux mois, une clarinette en ut qui prenait le soleil depuis au moins aussi longtemps. Dans le coin, un euphonium qui, lui, n'avait que quinze jours de présence. Pour le reste, quelques violons, une mandoline, une paire d'harmonicas, un bandonéon violet et des petites boites de colophane et des étuis pour anches de saxophones. C'était toujours une joie de regarder les soupapes nacrées du saxophone, de revoir tous les petits tuyaux de laiton se tortillant dans le ventre d'un gros tuba. C'était une espèce de drogue. Nous étions tout simplement fascinés par les instruments"
La fin de Bull Macha: "Une fantastique bonne humeur s'épanouit dans le cœur de Bull, involontairement son soulier pointu se mit à battre la mesure sur le parquet et son regard, à présent rempli d'une volupté religieuse, était suspendu aux baguettes du vibraphoniste qui se contorsionnait au-dessus de l'instrument. Et la révolte désespérée qui lui avait serré la gorge tout l'après-midi et presque jusqu'au moment où il avait entendu l'orchestre, se transforma en un sentiment de victorieuse certitude: ça continuait, ils n'avaient pas réussi à l'étouffer, c'était toujours le même jazz qu'avant et les mêmes foules qui le dansaient, une musique insolente comme elle l'avait toujours été et que personne n'arriverait jamais à chasser de ce monde, ce monde qui était le seul auquel il appartenait"

Aucun commentaire: